L'Offensive des Ardennes au Luxembourg
Peu avant le 16 décembre 1944, une série de rumeurs incontrôlables circulaient près de la frontière orientale du Luxembourg, laissant entendre qu'une contre-offensive allemande pourrait être imminente. Cependant, les quelques troupes américaines stationnées au Luxembourg ne montraient pas la moindre nervosité et continuaient, comme toujours, leurs activités quotidiennes de manière détendue, ce qui amena la plupart des habitants à conclure que ces rumeurs relevaient de la pure imagination.
Cependant, soudainement, dans les premières heures du matin du 16 décembre 1944, le grondement lointain de l’artillerie, le fracas des obus explosant et le crépitement des mitrailleuses révélèrent un événement totalement inattendu. Une agitation soudaine et incontestable au sein de l'armée américaine ne laissait aucun doute : une contre-attaque allemande était en cours.
Personne n'aurait pu imaginer que l'armée allemande puisse encore rassembler une telle puissance. La population civile ne le pouvait pas, pas plus que les soldats américains et leurs supérieurs. Noël approchait à grands pas et les premières pensées d'une fin de guerre se faisaient jour. Mais Adolf Hitler, déconnecté de la réalité depuis l'attentat contre sa personne, était convaincu qu'il pouvait à nouveau prendre les rênes du pouvoir dans l’Ouest et voyait les choses autrement. Dès septembre 1944, il avait fait part de ses intentions au maréchal Wilhelm Keitel et au général (« Generaloberst ») Alfred Jodl.
Le plan utopique d'Hitler poursuivait un double objectif, à la fois stratégique et politique. Ses troupes devaient conquérir le port d'Anvers (Belgique) et s'en emparer. Par la même occasion, elles devaient rejeter les troupes britanniques à la mer afin qu'il puisse négocier un traité de paix séparé avec les Américains. Selon son imagination, il comptait alors retirer ses troupes de l’Ouest pour les diriger contre les Soviétiques à l’Est.
Pour de nombreuses raisons, les meilleurs généraux et stratèges d'Hitler n'auraient jamais lancé une telle offensive. Politiquement, le soi-disant Troisième Reich était isolé et sans alliés. L’ancienne alliée, l’Italie, et l’Axe autrefois puissant étaient anéantis. Le Japon avait poliment suggéré à l’Allemagne d’entamer des négociations de paix avec les Soviétiques. Avec le recul historique, on peut affirmer qu'un tel projet ne pouvait germer que dans l'esprit d'un dirigeant ayant perdu tout sens de la réalité, croyant encore que ses troupes étaient capables d’un tel effort.
Néanmoins, l'attaque surprise dans les Ardennes réussit initialement. Les bastions américains furent submergés, une résistance américaine farouche fut contournée puis écrasée par les troupes allemandes qui suivaient, et au début de l’offensive, le ciel couvert empêcha l’aviation alliée d’intervenir.
Les troupes allemandes parvinrent ainsi à enfoncer un violent coin d'attaque dans les lignes de défense américaines. Mais les soldats américains, souvent en infériorité numérique et contrairement aux prévisions d'Hitler, tinrent bon et rendirent la progression allemande de plus en plus difficile, jusqu'à ce qu'elle finisse par s’arrêter.
Le 22 décembre 1944, le général George S. Patton Jr. contre-attaqua avec sa 3e Armée américaine. Pour ce faire, il mobilisa, en plus de la 4e division blindée américaine, les 26e et 80e divisions d’infanterie. Avec une force déployée dans la région de Bettborn, Pratz, Grosbous et Buschrodt, le 104e régiment d’infanterie et des unités rattachées à la 26e « Division Yankee » furent chargés de nettoyer ces zones de la présence ennemie.
Ce n’est qu’à la fin de janvier 1945 que les troupes allemandes furent repoussées à leurs positions initiales, d’où elles avaient attaqué le 16 décembre 1944. Mais des troupes de la Wehrmacht allemande se trouvaient encore sur le sol luxembourgeois. Ce n’est qu’avec la libération de Vianden en février 1945 que la domination nazie au Luxembourg prit définitivement fin.
Les lourdes pertes en soldats, chars, avions de chasse et carburant accélérèrent de manière significative la chute du Reich allemand. Après l’effondrement de l’offensive, l’armée allemande perdit définitivement sa capacité à mener des opérations d’envergure sur le front occidental. Trois mois plus tard, la Seconde Guerre mondiale prenait fin.
Le bilan des pertes humaines
Lorsque des unités allemandes attaquèrent les lignes américaines dans les Ardennes, au Nord du Luxembourg et à l’Est de la Belgique, le 16 décembre 1944, ce fut le prélude à une bataille qui allait devenir l’une des plus sanglantes de l’histoire de la Seconde Guerre mondiale. Cette bataille, où des milliers de soldats américains et allemands perdirent la vie, se déroula dans les conditions impitoyables de l’un des hivers les plus rigoureux de l’histoire.
En janvier 1945, une grande partie de la région luxembourgeoise de l’Éislek était en ruines en raison des combats acharnés, et de nombreux citoyens périrent dans les champs ou dans ce qui restait de leurs foyers.
La bataille des Ardennes fut la plus coûteuse jamais menée par l’armée américaine : 10 733 soldats américains y laissèrent leur vie et 42 316 furent blessés. Du côté allemand, on dénombra 12 652 morts et 38 600 blessés. Lors de l’offensive des Ardennes, environ 500 civils furent tués dans le Grand-Duché de Luxembourg.
Rédigé par Erny T. Kohn - Cercle d'Études sur la Bataille des Ardennes (CEBA)
Sources et bibliographie :
- The Ardennes - Battle of the Bulge, Hugh Cole
- Luxemburg in der Ardennenoffensive, Prof. Joseph Maertz
- Die Ardennenschlacht 1944-1945 in Luxemburg, Jean Milmeister